Shibuya Zarny, réfugié birman devenu styliste sans frontières

Titelbild
Cette photo prise le 23 mai 2024 montre le créateur de mode Shibuya Zarny (à gauche), né au Myanmar, en train de vérifier l'ajustement d'une robe sur un mannequin dans son atelier de Tokyo. Après avoir fui le Myanmar pour le Japon avec ses parents lorsqu'il était enfant, Shibuya Zarny a commencé sa carrière dans la mode en tant que mannequin à Tokyo, avant de confectionner des vêtements pour la royauté. (Photo KAZUHIRO NOGI/AFP via Getty Images)
Von 5 juillet 2024

Il a habillé des personnalités comme Aung Sang Suu Kyi et l’ex-Premier ministre japonais Shinzo Abe, avant de connaître une période difficile. Mais l’art du rebond est enraciné chez Shibuya Zarny, ancien réfugié birman devenu créateur de mode à Tokyo.

« Un jour quelqu’un m’a dit ‘Tu es un bohémien de la mode’. Et c’est vrai » raconte à l’AFP Shibuya Zarny, 39 ans, dans l’appartement exigu où il a installé son atelier dans le Nord de Tokyo, après avoir dû abandonner son showroom dans le quartier chic d’Omotesando durant la pandémie.

« J’ai tout perdu » avec le Covid-19, raconte-t-il. Les soirées mondaines, indispensables pour vendre ses luxueuses créations, avaient disparu à Tokyo. Et son précieux client Shinzo Abe a quitté le pouvoir en 2020 puis été assassiné deux ans plus tard.

Il y a aussi eu le coup d’Etat de 2021 en Birmanie, qui a brisé la transition démocratique menée par la dirigeante Aung Sang Suu Kyi et les membres de son parti, avec lesquels le styliste avait tissé des liens.

Fuir la Birmanie avec ses parents pro-démocratie

Mais repartir de zéro, il sait ce que c’est. En 1993, âgé de huit ans, il avait dû fuir la Birmanie pour se réfugier au Japon avec ses parents, des militants pro-démocratie menacés par la junte au pouvoir.

Sur un mur du couloir de son atelier, des dizaines de petites aquarelles représentent des paysages bucoliques de son pays natal, avec des ciels de feu et des arbres à fleurs tombantes couleur rubis.

« Mon grand-père, un professeur aux Beaux-arts, les a peintes pour moi quand j’étais enfant, parce que la Birmanie me manquait », confie-t-il. Adolescent, il trouve une parade pour éviter d’être persécuté en classe: s’habiller avec style. Initié à la couture par sa mère, il se met à créer ses propres vêtements.

Avec sa silhouette fine, ses cheveux de jais et son regard pénétrant, il se fait remarquer à vingt ans à Shibuya, le quartier de la jeunesse à Tokyo, et perce d’abord comme modèle. Il prendra plus tard comme prénom le nom de cet arrondissement où sa carrière a démarré.

Cette photo prise le 23 mai 2024 montre le créateur de mode Shibuya Zarny, né au Myanmar, lors d’une interview avec l’AFP dans son atelier à Tokyo.

Un rôle de trait d’union dans les échanges diplomatiques nippo-birmans

Il fonde en 2011 sa propre marque de mode, Zarny, et obtient la nationalité japonaise en 2012.

La même année, Aung San Suu Kyi, de nouveau libre à l’époque, reçoit à Oslo le prix Nobel de la paix qui lui avait été décerné 21 ans auparavant. Elle porte pour l’occasion l’un des quelque 70 « longyis » (tenue traditionnelle birmane, nouée à la taille) que le styliste lui avait offerts. « Ce moment a changé ma vie », raconte aujourd’hui M. Zarny avec émotion.

Thorbjorn Jagland, président du comité Nobel, et Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Nobel, se serrent la main lors de la conférence sur le prix Nobel de la paix à l’hôtel de ville d’Oslo, le 16 juin 2012, à Oslo, en Norvège. Aung San Suu Kyi a reçu le prix Nobel de la paix en 1991, mais n’a pas pu le recevoir après avoir été assignée à résidence pendant la majeure partie des 24 dernières années par la junte militaire birmane. (Photo Ragnar Singsaas/Getty Images)

Il joue ensuite un rôle de trait d’union dans les échanges diplomatiques nippo-birmans, accompagnant par exemple en Birmanie une princesse impériale japonaise, Yoko de Mikasa, en 2019.

Militant de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), il aide cette organisation à secourir des personnes de son pays natal depuis le putsch de 2021 et contribue aussi lui-même à lever des fonds dans ce but.

Il conçoit également des robes de mariée, des costumes pour des séries télévisées japonaises et des artistes, des bijoux, des sacs à main… Et même du design d’intérieur depuis la pandémie.

Ce côté caméléon le fait se sentir un peu à l’étroit dans les milieux japonais de la mode, « où les gens se jugent » et « ne se parlent pas entre eux », selon lui.

« Redonner confiance et courage » aux Birmans

Le succès de l’un de ses défilés à Bangkok en début d’année l’a persuadé d’affirmer davantage ses racines d’Asie du Sud-Est. « L’Asie a inspiré tellement de stylistes français (…). Mais moi c’est ma région d’origine, j’ai ce sens authentique », estime M. Zarny.

Il veut aussi donner un message d’espoir aux Birmans, qui « ont perdu leur fierté et sont abattus. Avec mes créations, je veux leur redonner confiance et courage », explique-t-il.

Mode de vie-Japon-immigration-réfugiés par Kimiko de Freytas-Tamura Zarny Shibuya, un créateur de mode de 23 ans né au Myanmar, montre ses créations dans une boutique de Tokyo le 22 avril 2008. AFP (PHOTO TOSHIFUMI KITAMURA AFP via Getty Images)

« Un style chaleureux, sans discrimination ni frontières »

« Les nombreuses expériences qu’il a vécues durant son enfance se reflètent dans son style », qui est « chaleureux, sans discrimination ni frontières », déclare à l’AFP l’une de ses amies, Yayoi Suzuki, ancienne proche collaboratrice du grand couturier japonais Kenzo Takada, le créateur de la marque Kenzo, décédé en 2020.

Shibuya Zarny rêve lui aussi de percer un jour sur la scène parisienne de la mode.

En attendant, il vient d’offrir une tenue de sa confection pour la cycliste afghane Masomah Ali Zada, cheffe de mission de l’équipe des réfugiés aux JO de Paris-2024.



Kommentare
Liebe Leser,

vielen Dank, dass Sie unseren Kommentar-Bereich nutzen.

Bitte verzichten Sie auf Unterstellungen, Schimpfworte, aggressive Formulierungen und Werbe-Links. Solche Kommentare werden wir nicht veröffentlichen. Dies umfasst ebenso abschweifende Kommentare, die keinen konkreten Bezug zum jeweiligen Artikel haben. Viele Kommentare waren bisher schon anregend und auf die Themen bezogen. Wir bitten Sie um eine Qualität, die den Artikeln entspricht, so haben wir alle etwas davon.

Da wir die Verantwortung für jeden veröffentlichten Kommentar tragen, geben wir Kommentare erst nach einer Prüfung frei. Je nach Aufkommen kann es deswegen zu zeitlichen Verzögerungen kommen.


Ihre Epoch Times - Redaktion